Histoire de Bessan

La Monédière à Bessan, un habitat gaulois fortifié

Un site de première importance

Installé sur un promontoire dominant d’une dizaine de mètres la plaine de l’Hérault, le site de La Monédière est le siège d’un important habitat de la fin du premier âge du Fer. Occupé sans discontinuité entre le début du VIe siècle et la fin du Ve siècle avant notre ère, son émergence et son essor s’inscrivent dans un contexte marqué par le développement du commerce méditerranéen en Gaule méridionale.

Probable point de rupture de charge pour les embarcations remontant le fleuve depuis son embouchure, distante d’à peine 6 km, il bénéficie d’une position géographique très favorable, lui permettant de capter les marchandises acheminées depuis la mer par les négociants méditerranéens (Grecs, Etrusques) et d’assurer leur redistribution vers l’arrière-pays gaulois. Véritable pivot économique, il s’érige comme un centre majeur de la région, ayant pu accueillir, aux côtés des autochtones, des individus d’origine grecque.

Une agglomération protohistorique bien structurée

Les habitations absidiales de l’âge du Fer.

D’une étendue de près de 4 hectares, l’établissement est retranché, au moins dès la seconde moitié du VIe siècle avant notre ère, derrière une puissante fortification constituée d’une imposante enceinte fossoyée, large de 10 m et profonde de plus de 4 m, doublée d’une muraille à soubassement en pierre et à élévation en briques crues.

Le système défensif suit un tracé orthogonal sur lequel est calquée l’orientation de la plupart des habitations. Ce canevas urbain, totalement original en milieu indigène, sous-tend l’existence d’un programme de construction bien planifié, reflet d’une communauté suffisamment structurée pour adopter et respecter un schéma d’organisation préétabli.

En l’espace de 200 ans, l’habitat voit se succéder sans interruption chronologique sept phases d’occupation, parfois entrecoupées d’épisodes de destruction par le feu.

Ces phases de réaménagement s’individualisent notamment par la mise en œuvre de formes architecturales spécifiques, donnant naissance à des habitations tantôt absidiales tantôt rectangulaires.

S’exprimant sur un laps de temps relativement court, cette alternance de plans, pour laquelle on ne connaît pas d’exemple comparable dans le Midi de la France, résulte vraisemblablement de mécanismes d’ordre socioculturel dont l’existence souligne un peu plus la singularité de La Monédière.

 

La tombe d’un nouveau-né enterré dans l’habitat gaulois.

Un abandon ritualisé ?

Intervenant vers 425 avant notre ère, l’abandon du site s’accompagne d’un démantèlement méthodique de la muraille, dont les éléments sont basculés dans le fossé défensif qui est alors en grande partie comblé.

Précédant de peu cet évènement, les reliefs d’un important banquet sont déversés à l’intérieur d’une gigantesque fosse, atteignant près de 17 m de diamètre et 6 m de profondeur, implantée au sein même de l’habitat. Ces restes sont représentés par des restes de viande, se rapportant essentiellement à du bœuf, ainsi que par une très grande quantité d’amphores vinaires accompagnées de récipients pour certains complets voire intacts, principalement dédiés à la préparation, au service et à la consommation du vin. Leur présence suppose la participation de nombreux convives, dont une partie pourrait être en partie allochtone ainsi que le suggèrent les affinités qu’offrent ces dépôts avec certaines pratiques de commensalité à caractère rituel observées dans le monde grec.

Ces vestiges pour le moins exceptionnels laissent envisager une cérémonie de clôture du site impliquant l’ensemble de la communauté, dont une composante a pu se déplacer et s’établir dans la colonie d’Agathé (Agde) qui est précisément fondée à cette époque par les Grecs de Marseille.

De la préhistoire à l’Antiquité

La citerne d’époque romaine.

Dans le courant du IIe siècle avant notre ère, le site de La Monédière est réinvesti. Cette nouvelle occupation, qui perdure plusieurs siècles, semble prendre la forme d’un établissement plus modeste qu’auparavant, abritant un complexe thermal auquel pourrait être associée une citerne remarquablement bien conservée. Avec cet ensemble fonctionnent une voie carrossable ainsi qu’une petite nécropole à inhumation.

Les recherches récentes ont également permis de mettre pour la première fois en évidence une occupation beaucoup plus ancienne, attribuable au Néolithique final (entre 3000 et 2500 avant notre ère). Ces vestiges préhistoriques correspondent à des trous de poteaux pouvant marquer l’emplacement de bâtiments et à des niveaux de sol jonchés de vases fragmentés, d’ossements d’animaux et d’éclats de silex, témoignant d’activités de type domestique. Ils se rapportent à un petit habitat localisé à la pointe méridionale du promontoire.

La présence de ce dernier montre à quel point le site de La Monédière constituait, dès la Préhistoire, un lieu d’installation privilégié.

Les fouilles programmées actuelles

Fouilles 2018.

Depuis 2017, le site de La Monédière fait l’objet de fouilles archéologiques programmées, impliquant des universitaires, des chercheurs du CNRS et des archéologues de collectivités territoriales, encadrant chaque été des étudiants bénévoles issus d’université françaises et étrangères.

Deux principales zones de fouille, d’une surface totale de près de 600 m2, ont été investies. Elles permettent d’étudier l’ensemble des différentes périodes d’occupation du site.

Texte et photos : Alexandre Beylier.

« La Mise au tombeau du Christ » de l'église Saint-Pierre de Bessan…

… De la reconnaissance patrimoniale à la restauration d'un rare décor éphémère religieux de la fin du XVIIe siècle. 

Les campagnes de prospection de la Conservation des Antiquités et Objets d'art de l'Hérault ont permis d'identifier et de protéger par son classement Monument historique, en 1993, une grande peinture sur bois de la fin du XVIIe siècle, conservée dans l'église de Bessan. Propriété de la commune, l’œuvre nécessite aujourd'hui une attention particulière. A l'aide du « plan Objet » initié par la Conservation régionale des Monuments historiques (Drac Occitanie) en partenariat avec la Communauté d'agglomération Hérault-Méditerranée, un financement a été mis en place pour la conservation d'urgence de la peinture ainsi qu'une étude pour sa restauration.

Vue générale de la peinture.

Daté de la fin du XVIIe siècle, ce grand tableau (2,20 m x 1,55 m) représente La Mise au tombeau du Christ entouré de Marie, Joseph d'Arimathie, Nicodème, saint Jean l'Evangéliste et une sainte femme. Cette iconographie était l'un des sujets familiers des maisons religieuses avec la Déposition de Croix, la Déploration sur le Christ mort ou la Vierge de Pitié, des représentations largement diffusées par les ordres mendiants à partir du XIVe siècle, et généralement issues des Révélations de sainte Brigitte dans lesquelles les douleurs de la Vierge font écho à celui du Sauveur.

Vue générale du revers de la peinture.

La singularité du tableau de Bessan se situe dans sa bordure qui épouse les silhouettes des personnages bibliques, une conception originale qui indique qu'il s'agit d'un élément de décors éphémères religieux. Ces derniers, réalisés entre le XVIIe et le début XIXe siècles, illustraient les épisodes de la Passion dans des mises en scène théâtralisées, et étaient installés durant la Semaine sainte dans les églises comme les oratoires de Confréries. Exécutés sur bois ou sur toiles, ils sont localisés traditionnellement en Catalogne, en Ligurie ou en Corse, nommés respectivement « monument », « cartaleme » ou « sepulcru. »

Tombés dans l'oubli, dispersés et en partie détruits suite aux changements de pratiques religieuses au XXe siècle, ces décors éphémères sont redécouverts et étudiés au début des années 2000 et exposés en 2013 dans le cadre prestigieux du Palais ducal de Gênes. A l'appui du tableau de Bessan et des recherches le concernant, il est aujourd'hui possible d'ajouter le Languedoc comme autre centre de production de décors populaires sacrés de la Semaine sainte, appelé également « Monuments » dans notre région.

Détail du tableau.

-Le tableau de Bessan faisait à l'origine parti d'un ensemble plus conséquent, aujourd'hui perdu. L’œuvre se présente en six planches de bois assemblées et maintenues par des traverses clouées au revers. Le panneau est aujourd'hui affaibli par l'attaque d'insectes xylophages et sa structure est très altérée. En témoignent les planches écartées, cassées et fendues. La peinture proprement dite a été retouchée à plusieurs reprises et à des époques différentes ; elle a été aussi revernie comme l'indiquent les coulures sombres sur la main gauche du Christ.

Détail du tableau.

L'opération mise en place concerne le traitement sanitaire de l’œuvre, à savoir la privation d'oxygène (anoxie) afin d'éliminer les insectes et les larves. Le travail indispensable de conservation a été confié par la Drac et l'Agglomération, en accord avec la commune, à la restauratrice Danièle Aroso, spécialiste de peinture sur bois, qui proposera ensuite un protocole de restauration générale assorti d'une proposition pour un nouvel accrochage en sécurité et sûreté. L'ensemble de ces opérations vise à garantir la bonne conservation du tableau, à retrouver sa cohérence technique et esthétique et à présenter au public et aux fidèles un de rares « Monuments » du Languedoc et de l'Hérault dans son lieu d'origine.

La chapelle St Laurent de Touroulle

 

La chapelle Saint Laurent de Touroulle, aquarelle d’André Fernandez.

Nota : les parties plus poétiques de l'histoire de cette chapelle aujourd'hui en ruines, joliment écrites par André Fernandez et toujours très exactes, sont à l’origine de cet article. Pour le compléter sans le dénaturer, les textes ajoutés sont inscrits en caractères italiques.

La chapelle Saint-Laurent fait partie, au Moyen âge, de l'ancien village de Touroulle, situé entre Bessan et Vias. La présence de deux très gros blocs de basalte laisse penser qu'il y avait là, à l'origine, un temple païen.

 Allongée sur un petit promontoire affleurant une rive de l’Ardaillon, un des bras du delta de l’Hérault, la Chapelle St Laurent de Touroulle veille sur un territoire au riche passé remontant à la nuit des temps, occupé tour à tour par les Ibères, les Celtes, les Romains et la civilisation médiévale.

Construite au XIe siècle, sur l'emplacement d'une ancienne villa romaine, mais aussi en bordure d'une voie antique, appelée route Mercadale, qui reliait l'oppidum de la Monadière au port dit du Canalet, situé entre la plage de Portiragnes et celle de Vias, elle est bâtie selon les caractéristiques et la symbolique des édifices religieux romans languedociens :

- Chœur orienté vers le Levant, vers la lumière, symbole du Christ : « Je suis la lumière du monde, (Jean VIII, 12) ».

- Porte d’entrée, au Sud, face au soleil dans sa gloire, abritée du vent du nord. Porte plein cintre, aux montants en pierre de taille, elle prie pour les âmes oubliées.

- Deux petites fenêtres romanes, l’une au sud, l’autre au nord, éclairant son chœur.

Transformée, semble-t-il au XIIe ou XIIIe siècle, la chapelle Saint-Laurent est probablement abandonnée, en même temps que le reste du village, au moment des guerres de Religion, elle perd son chevet roman dont il ne reste aujourd’hui que l’arc plein cintre visible à l’intérieur de la chapelle et quelques fondations dans son prolongement.

Enigmatique, elle livre un à un ses secrets. Lors de fouilles effectuées par l'abbé Thomas en 1938, deux petites urnes funéraires, un sarcophage mérovingien (qui sera transporté dans le jardin du presbytère de Bessan où il est encore),  ainsi qu’un puits de l’époque romaine, ont été retrouvés à l’emplacement du maître autel.

Vigie solitaire, elle porte les stigmates du temps et les blessures des hommes.

Gardienne fidèle, elle veille imperturbable sur cette terre chargée des peines et des joies de tout un village à jamais disparu, espérant que vienne le jour d’une possible rénovation, d’une renaissance.

André Fernandez, 2016.

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La chapelle a évité la destruction lors du passage de la voie rapide reliant le péage de l'autoroute au Cap d'Agde, mais une partie de son cimetière wisigothique est détruite.* Elle devra subir un autre outrage en 2001, dû cette fois à des pilleurs de pierres.

*A noter qu'il existe de nombreuses autres chapelles sur le territoire de Bessan : Affrie, Saint-Claude, Pénitents gris, Saint-Martin de Caillan, Grange des Pères, chapelle du château de Brignac

Le clocher de l’église Saint-Pierre et ses éléments architecturaux

 

Croquis de Frédéric Mazeran, 2015.

La partie basse du clocher, insérée dans le bâti, est d’une architecture remarquable et presque unique dans la région, et sa partie la plus ancienne, agrémentée en son sommet d’arcatures lombardes, date du IXe siècle. Ces petites arcades, faites pour rigidifier le mur plus que pour soutenir l’édifice, sont garnies de modillons sculptés alternativement de têtes d’animaux et d’autres composantes.

Ce style, commun dans les constructions d’églises de cette époque, est, de plus, orné de parties d’une couleur brunâtre composées de scories de lave. Un peu particulier, il constituait une frise au sommet de chaque étage d’un clocher et n’est plus visible que dans une seule autre commune du département : Puissalicon. Dans ce village, ce qui est communément appelé « la tour romane du XIe » n’est autre que le clocher à 5 étages d’une ancienne église construite avec les matériaux des environs, mais comportant les mêmes arcatures et modénatures bi-chromes. Cela laisse à penser que le clocher de l’église de Bessan pouvait comporter autant d’étages que sa « cousine » de Puissalicon.

Et c’est bien la preuve que la base du clocher de Bessan n’est pas la tour de l’ancien château féodal, mais bien le clocher de l’ancienne église, détruite et saccagée puis reconstruite à partir du XIIe siècle en commençant d’abord par l’abside et le chœur, et ensuite par la nef aux XIIIe et XIVe siècle.

D’ailleurs, les poutres et chevrons peints découverts lors des travaux de 1993 et actuellement en cours de datation, sont très probablement de cette époque et se retrouvent aussi chez une autre « cousine », dans l’église de Saint Pons de Mauchiens. Pour cette dernière, la découverte est relativement récente et des études tentent de démontrer leur similitude.

Ces éléments confortent l’idée que la partie basse du clocher de l’église Saint Pierre de Bessan est un des plus anciens de la région.

Depuis le 13 décembre 2016, l’ensemble de l’église est classée à l’inventaire des Monuments Historiques.

Histoire de la Guinguette de Bessan

Le premier des deux bâtiments situés au bord de l’Hérault était à l’origine l’ancienne station de pompage, et le second qui est devenu le principal de la Guinguette actuelle, était alors le logement d’un gardien qui y vivait avec sa famille, et en assurait la maintenance.

Dans les années 60, la station a été désaffectée et, quelques années plus tard, l’habitation n’accueillait plus d’occupants. Dès cette époque, la Guinguette était un lieu de détente pour les Bessanais qui n’hésitaient pas à y camper.

Au milieu des années 80, la municipalité de l’époque décida d’entreprendre des travaux afin de dédier ce lieu aux loisirs : une grande salle était aménagée en rez-de-chaussée de l’ancienne habitation, et un coin grillade créé, tandis que les vieilles pompes au sous-sol du second bâtiment étaient retirées pour laisser place à une dalle de ciment : le lieu de loisirs, bien qu’encore rudimentaire, était prêt. Par la suite, la Guinguette a été utilisée tant par des associations bessanaises que par des particuliers pour des réunions, repas ou de fêtes, puis par des promeneurs cherchant la tranquillité, la fraîcheur, et l’ombre des grands arbres. Le site, très agréable, était apprécié des Bessanais qui venaient déjà s’y reposer, regarder les pêcheurs, et, pour les fêtes, applaudir les jouteurs, participer au « Capelet » ou aux courses de canards.

En 1996, la ville décida d’améliorer le site : la conduite de rejet de la station d’épuration fut déplacée, la berge empierrée, et des pontons flottants installés. Des toilettes, une piste de danse, une scène et, tout proche, un grand parking éclairé complétaient l’ensemble.

Depuis l’an 2000, la Guinguette est mise en gérance durant la saison estivale afin de proposer de nouveaux services : croisiéristes fluviaux et promeneurs peuvent louer des petites embarcations, se rafraîchir à la buvette, ou se restaurer. Depuis, la Guinguette ne cesse de s’améliorer. Des travaux d’entretien et de rénovation sont régulièrement entrepris afin de moderniser le site et de le rendre le plus agréable possible : remplacement des pontons, mise en conformité de la cuisine avec l’installation de matériel professionnel, agrandissement de la piste de danse ainsi que de l’aire de restauration, réalisation des peintures extérieures, fleurissement assuré par l’agglomération, réalisation d’une fresque par l’artiste bessanaise Colette Lescouet-Gourvès pour orner le bar existant...

Une bien belle histoire qui semble devoir durer, au vu du succès remporté par les services offerts par ce lieu frais et accueillant, sans chichis inutiles, au bord de l’eau.

La légende de l’Âne de Bessan

et la tradition de sa présence à la fête locale


 
 

L'autre légende

L'autre légende, à laquelle les Bessanais se fient peu, relie l’animal totémique bessanais à celui de Gignac, situé entre Montpellier et Lodève, dont l’âne est également l’animal emblématique. Les habitants de Gignac disent qu’en 730, un âne par ses braiements a prévenu leur ville de l’arrivée dévastatrice des guerriers sarrasins. Ceux-ci, furieux car n’ayant de ce fait pu détruire Gignac, auraient jeté le courageux quadrupède dans le courant du fleuve Hérault, où il aurait alors été recueillis et fêté à Bessan.

 
 

Les Bessanais d’origine connaissent les légendes de leur animal totémique, mais les nouveaux habitants sont souvent surpris par l’importance que prend cet Âne dansant dans les cérémonies et moments forts du village, et notamment dans le programme de la fête locale de la Saint Laurent.

Une particularité locale fait que perdurent depuis des décennies deux légendes de l’âne, bien que la première, celle contée ici d’abord, soit la plus communément admise. (voir l'encadré au bas de ce texte la seconde légende).

Les plus anciens des Bessanais parlent plutôt d’une foire aux ânes (les archives évoquent une grande foire à l’époque de la Saint-Laurent, créée par François 1er), et de la tradition de décorer le plus bel animal de fleurs et de clochettes puis de le promener en cortège dans les rues pour lui faire honneur. Un jour, l’âne, affolé par la foule et le tintement des clochettes, se serait échappé de cette cohue et réfugié dans l’église. L’histoire était belle et devint rapidement une légende locale. Pour la faire revivre, les Bessanais auraient alors fabriqué un âne factice joliment orné de fleurs de papier coloré, qu’ils auraient fait défiler dans les rues du village pour la Saint Laurent, et fait bénir par le curé. L’Âne est ainsi devenu l’un des emblèmes du village (l’autre est la Tuque, mais c’est une autre histoire… !) et les habitants sont très fiers de ce qu’il symbolise aujourd’hui.

L’Âne actuel est composé d’une charpente en bois lamellé collé couverte de toile de jute, sous laquelle se glissent les porteurs qui le font danser ; sa tête est une sculpture de mousse polyuréthane peinte, et sa queue est une véritable queue de cheval ornée d’un gros nœud aux couleurs du drapeau français. Chaque année, l’âne est orné de neuf par la jeunesse locale menée par les deux chefs de jeunesse et les trois demoiselles d’honneur élus dès le printemps : sur le dos est inscrite l’année, sur les flancs sont représentés d’un côté la Tuque et de l’autre un magnifique Coq, et le reste du corps de l’Âne est décoré d’une multitude de fleurs en crépon de toutes les couleurs selon le goût de l’équipe de jeunes.

Chefs de jeunesse et demoiselles d’honneur ont la responsabilité de représenter la jeunesse locale lors des cérémonies de la fête locale et de contribuer à ce que celle-ci soit populaire et de qualité. Les traces de cette tradition remontent à 1788 où deux jeunes hommes furent chargés d’organiser un bal pour la Saint-Laurent ; en 1958, apparaissent à leurs côtés trois jeunes filles, appelées initialement « cheftaines ». La tradition se perpétue depuis, même si elle évolue un peu avec l’apparition il y a quelques années d’un Petit Âne, qui permet  aux plus jeunes de se rassembler autour des mêmes valeurs lors de la fête de la Saint-Laurent alliant générations, traditions et… fierté d’être Bessanais.

 

 

L’histoire du moulin à vent de Bessan

 

Le « moulin à vent » a été bâti sur le plus haut sommet de la commune, le Mont Ramus, qui culminait à 84 mètres, lieu particulièrement venté. Cet édifice a été inscrit à l’inventaire du patrimoine culturel avant qu’il ne soit détruit en juin 1973 pour la construction de l’autoroute A9. Il était constitué en roches volcaniques et composé d’une tour tronconique de 6 mètres de diamètre au sommet et de 7 mètres à la base. Au rez-de-chaussée, s’ouvrait une porte rectangulaire surmontée d’une fenêtre ; à gauche de cette fenêtre, le linteau d’une autre fenêtre sur piédroits qui a été bouchée ; une autre fenêtre à embrasement donnait vers l’Est. En dessous d’elle, on remarquait un mur crépi, restes d’une habitation. A l’intérieur, on voyait un évier de pierre et les marches d’un escalier en maçonnerie. Les vestiges d’un escalier extérieur à degrés de bois qui aboutissait au sommet étaient visibles.

Ce moulin figure peu dans les archives. Sur le livre des impôts de 1699, on trouve un certain Antoine de Turc, chanoine de Béziers, propriétaire d’une grande maison rue du Four et de terres à « l’alle » et à la « sotte » des Monts Ramus.

Les Monts Ramus étaient des terres nobles, qui, à cette époque, appartenaient tout comme Touroulle, les Mèjeries et le moulin Bladier sur l’Hérault, au duc d’Uzès et n’étaient pas soumises à l’impôt. Le cadastre de Bessan de 1824, ne mentionne pas de moulin à vent, mais indique que tout le Mont Ramus, terres labourables, vignes et pâtures, appartenaient à un certain André Canet. A la révolution française, les propriétés, immeubles et terres, des familles nobles ont été réquisitionnés puis vendus comme biens nationaux. Sur le cadastre, figure une croix en son sommet, et un chemin qui dessert la métairie conduisant, non pas au moulin mais à un centre de production de meules rotatives domestiques en basalte de la fin du IVe siècle avant JC.

Les recensements de population de 1836 à 1872 indiquent tous les propriétaires, domestiques et habitants des Monts Ramus, mais à aucun moment il n’y est fait état de meunier. Ce n’est qu’en 1940 que le cadastre de Bessan signalera enfin la présence d’un « ancien moulin » avec à quelques mètres vers le sud, une croix. Dans les années 1950, Germaine Caussy affirmait être la dernière à y avoir habité dans sa jeunesse. Elle avait épousé en 1899 à Bessan Pierre Arribat, fils de Basile, berger et petit-fils d’un autre Basile, également berger. En ce début du XXe siècle, le moulin ou l’habitation qui lui est accolée, n’était occupé que par la famille du berger, le troupeau paissant la jasse située plus au nord.

Que peut-on en conclure ? Le moulin à vent de Bessan semblerait une exception sur le cours de l’Hérault, à cohabiter avec un moulin à eau. En effet, tous ceux des villages traversés par le fleuve (mis à part peut-être ceux d’Aumes et de Vias), sont des moulins hydrauliques. La raison vient de la faible productivité des moulins à vent, de leur exigüité qui n’autorisait l’emploi que d’une seule paire de meules et ensuite du fait qu’ils ne produisaient pas en l’absence de vent. Notre moulin Bladier pouvait travailler pratiquement tous les jours de l’année, sauf pendant les inondations. C’est peut-être pour cette raison que le moulin à vent aurait été construit pour remplacer le moulin à eau pendant les périodes de crues.

Si l’on résume, ce n’est qu’en 1940 qu’un moulin est signalé pour la première fois sous forme de ruines. Faut-il en déduire que le moulin a été construit après 1824 et abandonné avant 1940 ? L’histoire des moulins à vent dans notre région se termine fin XIXe, la vigne ayant pris la place du blé. Le moulin à vent aurait donc fonctionné moins de 75 ans et l’on peut même se demander s’il a fonctionné un jour. D’ailleurs, les Bessanais n’ont jamais nommé cet édifice « le moulin », ils allaient se promener à « la tour du Mont Ramus ».

On dit aussi qu’elle aurait été utilisée comme télégraphe Chappe ce qui expliquerait les aménagements, l’escalier en bois extérieur permettant d’accéder au mécanisme de commande qui se trouvait en son sommet et le logement des techniciens accolé à la tour. Or, il se trouve que cette tour ne figure pas sur le réseau des postes télégraphiques aériens de Chappe, la ligne du midi reliant Bordeaux à Avignon traversant notre département était jalonnée de tours Chappe distantes d’environ 10 km. Dans notre région, le réseau télégraphique Chappe n’a fonctionné que 15 ans, de 1838 à 1853, et les recensements de population de cette période ne font aucun état de technicien télégraphiste, pas plus que de meunier...

Francis Delmas, en collaboration avec « La Guilde 2 Bessan, Patrimoine et Traditions ».

Et si l’Homme de Bessan était le plus vieil hominidé d’Europe ?

En 1951, des carriers ont découvert un squelette complet sous la coulée de lave du volcan du Mont Ramus à Bessan.

Le front de taille de la carrière se composait d’une couche superficielle de terre sous laquelle on trouvait un lit de 1.50 m de bombes volcaniques de 50 à 60 cm de diamètre. En dessous de ces boules se trouvait la coulée de basalte d’une épaisseur de 10 à 25 mètres, elle-même située sur une couche épaisse d’argile, de graviers et d’alluvions. C’est dans cette dernière partie que les carriers creusaient des galeries sous la coulée de lave que l’on appelait sous-caves. La galerie une fois terminée était minée. Les explosions provoquaient l’effondrement de la couche de basalte qui se brisait en de nombreux morceaux qui servaient, après être débités et taillés, à faire des pavés pour carreler les rues, ou des blocs pour la construction.

 

Carrière du Mont Ramus, ouvriers creusant des sous-caves.

Marcel Ref raconte : « Lors d’une excavation sous la coulée de lave je me suis trouvé avec mon co-équipier face à un squelette enseveli allongé sur le côté. Nous avons dû, pour poursuivre notre tâche, dégager le crâne, les os et les membres. Pour ne pas risquer d’arrêter l’exploitation de la carrière et éviter une enquête, le responsable du chantier nous a ordonné d’inhumer les restes récupérés sans les déclarer ». Cette histoire a été rapportée par tous les employés de la carrière témoins à cette époque

Témoignage de Marcel Ref affiché dans la mairie de Bessan.

De toute évidence ce squelette n’avait pu être recouvert que lors de l’éruption du volcan que l’on a datée à 750 000 ans. Cette découverte est troublante quand on sait que le plus ancien squelette entier et intact était celui d’un homme ayant vécu il y a seulement 37 000 ans.

Comment expliquer cet état de conservation ? Les sépultures volontaires - ou les corps auraient pu être préparés - ne datent que de 100 000 ans. On peut donc émettre l’hypothèse que l’homme de Bessan est mort noyé dans un marécage ou des sables mouvants qui l’ont englouti, protégeant ainsi son corps des charognards comme les hyènes qui abondaient à cette époque où le climat était tropical.

 

Reconstitution du paysage de l’époque.

Par la suite, la gangue d’argile a protégé le squelette et évité qu’il ne carbonise sous la coulée de lave.

En 2009, une nouvelle a fait le tour de l’Europe. La presse, revues scientifiques, journaux, titrait en français, anglais et même catalan : « Un site préhistorique exceptionnel a été découvert dans l’Hérault, à Lézignan-la-Cèbe : sous une coulée de basalte vielle de 1 570 000 années, se côtoient restes d’animaux et objets fabriqués ». Cette découverte se résumait à de très nombreux ossements d’animaux (bovidés, chevaux, rhinocéros, éléphants, tigres à dent de sabre, hyènes, rongeurs) et à deux galets considérés comme taillés par la main de l’homme. Ces traces d’activité humaine constitueraient les vestiges du plus ancien peuplement européen.

Le basalte de Lézignan-la-Cèbe provient du volcan de Neffiès vieux de 1 570 000 années, celui des monts Ramus date de 750 000 ans ; cela ne signifie pas que le squelette enfoui bien en dessous de cette couche soit de cette dernière période, il pourrait être bien plus ancien.

Qui pouvait être cet homme ?

- l’homo sapiens (ou de Cro-Magnon), c'est-à-dire nous, apparait en Europe il y a 40 000 ans ; 

- l’homme de Néandertal (outils en pierre taillée, enterre les morts), 230 000 ans ; 

- le plus vieux crane d’européen découvert à ce jour a 450 000 ans ; 

- l’homme de Tautavel (Pyrénées Orientales), représenté par une seule dent, date de 550 000 ans ;

- l’homo « antecessor », le plus vieil hominidé d’Europe, aurait 1 200 000 années (machoire avec 4 dents découverte en Espagne);

- le premier « homme » est apparu en Afrique il y a 2 700 000 d’années.

L’homme de Bessan serait donc plus primitif que l’homme de Néandertal et plus ancien que l’homme de Tautavel. Il ferait partie de la lignée de « l’antecessor ». Il n’avait probablement pas la parole, fabriquait des outils rudimentaires (galets ou pierre éclatées) qu’il utilisait pour dépecer la viande, il était anthropophage.

L’homo antecessor cannibale, reconstitution.

En parodiant Yves Coppens, ma grand-mère m’aurait répondu (en espagnol !) : « Si toi tu descends de cet homme, moi sûrement pas, je ne suis pas Bessanaise ».

Si cette découverte avait été déclarée à l’époque, peut être que l’Homme de Bessan aurait été reconnu comme le plus vieil squelette d’hominidé d’Europe ? Imaginons les retombées pour le village de Bessan... !.

Les pompiers Bessanais et leur histoire

Le 19 novembre 1880, la mairie achète une pompe à incendie à bras et invite, le 27 février 1881, les citoyens à s’inscrire sur un registre pour manier cet outil de défense. Le premier corps de pompiers de Bessan est né : une équipe de 12 hommes est constituée avec, par la suite, un piquet de garde incendie.

Il faudra attendre le 10 août 1934 pour l’achat de l’autopompe Citroën B15 à incendie achetée par la municipalité pour la caserne suite au don d’un Bessanais anonyme. Cette autopompe compte parmi les premières en service dans le département.

Le 16 mai 1942, le corps des sapeurs-pompiers de Bessan, se composant de 20 hommes sous le commandement du sous-lieutenant Victor Goudou, est officiellement créé par la ville,. En 1944, l’autopompe Citroën B15 participera à l’extinction d’incendies à Vias, ainsi qu’à Béziers lors des bombardements de la ville en juillet.

Le 17 juillet 1947 est créée la caisse des sapeurs-pompiers, et le 19 mars 1948, l’adjudant Edgar Flour est nommé chef de corps.

En 1959, l’autopompe, surnommée « Titine », est encore seule en service jusqu’à l’achat d’une motopompe Guinard. A cette époque, une cinquantaine de bouches d’arrosage permettent le ravitaillement en eau courante.

En 1965, un camion d’une capacité de 3000 litres vient compléter le dispositif de défense incendie.

Dans les années 60, Georges Reynes devient chef de corps, puis suivront le lieutenant Christian Franc (1979-1999), le sergent Stéphan Laguna (1999-2001) et le caporal-chef Antoine Olacia (2001-2002).

En 1996, les locaux de la caserne, situés à proximité du centre social, derrière le Monument de la Victoire, sont transférés dans la nouvelle zone artisanale de la Grange Basse.

Le 1er janvier 2006, jusque là dépendant de la ville de Bessan, le corps des sapeurs-pompiers est départementalisé et dépend désormais du Service Départemental d’Incendie et de Secours (SDIS) de l’Hérault. La même année, les sapeurs-pompiers Bessanais seront jumelés avec ceux de Remich ; et le 3 juin, la nouvelle caserne sera baptisée du nom de l’adjudant Edgar Flour.